« Le record n’est pas une fin en soi »
Il a marqué 2016 et fait voyager des milliers de personnes. Thomas Coville, le skipper de Sodebo Ultim’ passe la ligne d’arrivée de son tour du monde en solitaire à la voile à 17h57 le 25 décembre 2016. Il établit un nouveau record et devient le marin le plus rapide du monde. Quelques mois après, au calme, Wellnews rencontre le skipper parrainé par Sodebo, aventurier opiniâtre qui n’en est pas à son dernier rêve.
1/ Vous avez marqué la fin 2016 et fait voyager des milliers de personnes qui ont suivi votre tour du monde. « Thomas Coville Roi du Monde » c’est ainsi que le Figaro vous a propulsé dans la cour des grands. Quelle vie avez-vous après tout ce brouhaha médiatique ?
« J’ai la lucidité et l’honnêteté personnelle de valoriser ce que j’ai fait en fin d’année. Je suis conscient que cela m’a nourri et que ce record a rempli chez moi une place importante que j’attendais depuis longtemps.
Cela me permet d’avoir plus de sérénité car j’ai répondu à des questionnements qui font partie des doutes d’un athlète.
J’ai la sensation de faire partie de la catégorie des gens qui découvrent après des années de recherches que leur hypothèse de départ est la bonne. J’ai l’impression d’avoir trouvé une représentation de ce que je suis à un instant T aligné avec le petit garçon que j’étais et l’homme que je tente de devenir. C’est rare et précieux dans une vie. Ma chance, c’est qu’on m’ait laissé le temps et que Sodebo m’ait accompagné toutes ces années. Je suis tellement heureux que cela rayonne sur toute l’équipe. J’ai adoré prendre le recul de les regarder heureux.
2/ De retour sur terre après cet exploit incroyable, on vous a vu et entendu partout ou presque. Vous maîtrisez l’interview au moins aussi bien que les manœuvres au ras des flots. Quel message cherchiez-vous à faire passer à travers cet exercice de style ?
« J’ai vite compris que des choses ne m’appartenaient plus. Je n’avais pas la notion de ce qui allait se passer et du nombre de gens qui allaient être présent à l’arrivée à Brest. Je me suis laissé submerger et j’ai accepté de me laisser porter par l’émotion après avoir tout calculé pendant le tour du monde. »
3/ Est ce que vous avez réalisé votre rêve ?
« J’avais ça en moi, ça résonnait. Je me sens légitime dans mon discours. J’ai cette conviction que la techno, c’est juste génial. La technologie ne va pas nous asservir mais nous aider à progresser. Cela fait voir la vie sous un autre prisme ! On nous montre depuis 30 ans que l’écologie est une contrainte alors que c’est une opportunité. Quand on rendra une ville, une rue, un bâtiment autonome, ça va tout changer. J’ai réalisé un rêve mais j’en ai plusieurs chaque nuit ! Le record n’est pas une fin en soi. C’est un projet extrêmement engagé qui me convenait bien et je ne me suis pas trompé. Le manteau était à ma taille ! A la troisième tentative, je savais que je pouvais le faire. A la quatrième, je savais que je le battrais.
La cinquième lui a donné raison. »
4/ Une fois qu’on est recordman du monde et quelques mois plus tard, on a envie de quoi ?
« Je regrette de ne pas avoir pris le temps de me poser. Quand tu gagnes et que tu es dans la spirale positive, tu as envie de concrétiser l’énergie pour qu’elle soit productive et tu as peur qu’elle t’échappe. C’est ma manière de réagir. L’énergie que te donne une victoire est nucléaire. Tu emmènes les gens, ça rayonne. J’aime cette complexité de la vie. J’ai une capacité de travail et de concentration qui s’alimente quand ça gagne. C’est jubilatoire et difficilement explicable.»