La communication est comme la musique, elle est faite de sons et de silence. C’est ainsi que bien communiquer n’est pas seulement communiquer de façon pertinente et juste, c’est aussi savoir communiquer au bon moment et savoir se taire lorsque cela est nécessaire ou lorsque cela se révèle plus efficace que de prendre la parole.
Le silence peut même être une stratégie ou une tactique de communication qui peut se révéler extrêmement efficace. C’est ainsi qu’en mai 1940[1] Lord Halifax et Winston Churchill viennent de trouver un accord de principe pour la nomination de Lord Halifax en tant que 1er ministre et Winston Churchill comme numéro deux. Un peu plus tard, réunis tous les deux dans le bureau de Chamberlain, ce dernier prend la parole et après une introduction déclare : « Je passe la parole à Lord Halifax pour mener à bien le royaume. Sir Winston Churchill, acceptez-vous d’être son second ? ». Churchill regarde droit devant lui, imperturbable, fumant son cigare et se tait ! Une minute… Une minute et dix secondes (… Interminable !). Une minute et vingt secondes (toujours aucune réaction d’aucune des parties… Le flegme britannique). Brusquement, au bout d’une minute et demie, Lord Halifax brise le silence : « Je pense que Sir Winston Churchill doit être le futur premier ministre de l’Angleterre ». La suite appartient à l’histoire.
Face à une demande de transparence toujours plus forte mais qui se heurte à des nécessités stratégiques de l’entreprise, on peut même aller jusqu’à garder le secret.
Il y a plusieurs sortes de secrets.
Il y a le secret par imposition: c’est le secret défini par la loi, par exemple dans les cas de PSE avec l’information préalable des salariés ou encore le secret d’informations boursières dont la divulgation serait susceptible de modifier le cours d’une action ou de créer un délit d’initié.
Il y a le secret d’opportunisme à la disposition des dirigeants pour les situations de crise qui permet d’éluder des questions difficiles en invoquant son existence.
Il y a aussi un secret très intéressant qui est le secret comme arme de communication. Pour cela, il faut comprendre que le secret génère des fantasmes : on parle d’agent secret, de complot secret, de secret-défense (l’intérêt supérieur du pays). Qui dit secret dit quelque chose qui est caché et qui est précieux. C’est pourquoi des entreprises ont développé le secret comme technique de communication: la formule du Coca-Cola : ici qui dit secret dit inimitable. Le black-out sur un lancement de produit fait partie de cette catégorie de secret. C’est le cas d’Apple et de Tesla qui en font un usage consommé.
Il y a aussi de grandes sociétés comme Mc Kinsey ou Lazard qui ont utilisé le secret comme stratégie première de communication pour valoriser leurs interventions: elles sont tellement exceptionnelles que nous ne pouvons pas les dire et, ce faisant, elles développent les fantasmes quant à leur savoir-faire.
Mais sans parler de « secret », il y a aussi les informations dites « sensibles » qu’il faut organiser. Parmi celles-ci, on peut identifier plusieurs catégories d’informations :
- Stratégiques (business plan, innovations…),
- Commerciales (fichier clients, projets en cours,…)
- Techniques (R&D, Process, …),
- Financières (crédits en cours, trésorerie, …),
- Organisationnelles (grille de rémunération, …).
Dans ce domaine, Wellcom a initié une démarche novatrice d’accompagnement des entreprises dans l’identification et la gestion des informations sensibles et secrètes (Miss® pour Management des Informations Sensibles et Secrètes) et publié tout récemment une étude importante menée avec le concours de l’institut Opinion Way auprès de 400 dirigeants[2].
La valeur de ces informations est naturellement très souvent dépendante du caractère confidentiel qui leur est attaché. Néanmoins, la productivité d’une entreprise dépend en large part du partage de ses informations avec ses partenaires et sa communication se doit de gérer un contexte sociétal qui valorise la transparence.
L’entreprise est donc aujourd’hui écartelée entre deux abîmes : garder le silence ou communiquer ouvertement avec ses parties prenantes. En dire trop ou ne pas en dire assez ? Deux extrêmes qui nuisent à la performance des organisations et auxquels ne peut répondre qu’une communication savamment orchestrée.
[1] Histoire bien connue des experts en négociation et repérée en premier sur le blog de Jean-Noël Chantreuil (jnchantreuil.com)
[2] Etude dons les principaux résultats sont téléchargeables ici