A l’occasion de la première conférence Web Diversity, qui s’est tenue le 21 mai dernier à Paris, Wellnews a tenu à interroger Edwy Plenel, Président et Directeur de la publication de Mediapart, sur le sens de la liberté de la presse aujourd’hui.
Edwy Plenel entre au journal Le Monde en 1980. Il y occupera diverses fonctions dans plusieurs services, passant de journaliste à grand reporter, puis rédacteur en chef avant de prendre le poste de directeur de la rédaction en 1996. En 2001, il devient Directeur général-adjoint de la société Le Monde SA puis est nommé directeur délégué en janvier 2004. Il démissionne en 2004 et quitte Le Monde l’année suivante. Il rédige depuis 2005 des chroniques politiques et littéraires pour France Culture, LCI, RTL et le quotidien Le Soir de Bruxelles. Il crée Mediapart en 2007, en collaboration avec François Bonnet, Gérard Desportes et Laurent Mauduit.
Vous avez participé, en tant que partenaire et intervenant majeur, à la première conférence Web Diversity. Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots quel était l’objet de cet événement ?
Organisée par Christophe Ginisty, la première conférence Web Diversity avait pour thème central la liberté de l’information à l’heure de la révolution numérique. A l’occasion de la journée mondiale de l’Unesco pour la diversité culturelle, le dialogue et le développement, les participants et les organisateurs voulaient montrer qu’Internet, loin d’être une grave menace pour la démocratie, peut être au contraire une très grande chance. A condition évidemment de s’en saisir pour tirer vers le haut nos démocraties, vers un droit de savoir des citoyens étendu, vers une liberté de la presse renforcée quel que soit le support, en somme vers un nouvel écosystème de l’information sur la base d’une nouvelle alliance entre journalistes et publics, entre la rigueur professionnelle des premiers et l’exigence participative des seconds.
Qu’est-il ressorti d’essentiel de cette conférence ?
J’ai proposé aux organisateurs que cette conférence se poursuive par un travail coopératif pour dessiner les grandes lignes d’une nouvelle loi fondamentale pour la liberté de l’information. Tout comme la grande loi de 1881 sur la liberté de la presse a accompagné et encouragé le début de l’ère médiatique, la démocratisation de la presse et l’autonomie du journalisme, il nous faut aujourd’hui rassembler toutes les questions essentielles pour la liberté de l’information. Par exemple, avoir l’équivalent français du Freedom of Information Act américain, mais aussi empêcher la dépendance du service public audiovisuel du pouvoir exécutif ou mettre fin aux conflits d’intérêts industriels ou financiers qui nuisent à la confiance du public dans l’information.
Un mot sur Mediapart qui a presque 3 ans d’existence… Quel bilan faites-vous de « l’aventure » ? Votre modèle survit-il bien au tout-gratuit sur le web, que vous pourfendez ?
Mediapart en un peu plus de deux ans d’existence, puisque nous nous sommes vraiment lancés le 16 mars 2008, a gagné l’essentiel de son pari: nous avons montré que, si l’offre était au rendez-vous, la demande suivait. Notre pari, c’était celui de la valeur du travail: vertu de l’indépendance, qualité de l’information, participation d’un public fidèle. Et cette valeur se concrétisait dans notre modèle payant, fondé sur l’abonnement. Or il n’y a pas eu un jour, depuis le début, sans abonnement à Mediapart, sur un rythme qui, aujourd’hui, est, chaque mois, d’un millier de nouveaux abonnés, en chiffres bruts. Nous en sommes à près de 25 000 abonnés. Il nous en faut le double pour devenir rentables. C’est le défi des deux années qui sont devant nous. Je suis d’autant moins inquiet que nous avons fait école, à la manière d’un laboratoire précurseur : toute la presse généraliste d’information vient au payant sur le Net.