Interview de Catherine Tasca, Sénatrice des Yvelines et Vice-présidente du Sénat
A l’occasion de la réforme de l’audiovisuel entamée par le gouvernement, Catherine Tasca, sénatrice des Yvelines et Vice-présidente du Sénat, a cosigné une lettre ouverte dans La Tribune, le 10 novembre dernier. Objectif : appeler à la préservation de l’indépendance des media par rapport à l’Etat et aux groupes économiques privés, ainsi qu’à la maintenance du pluralisme dans les media. Elle revient, ce mois-ci pour Wellnews, sur l’objet de cette lettre ouverte.
Diplômée de Sciences Po Paris et énarque, Catherine Tasca a consacré sa carrière à la culture. Après avoir dirigé la Maison de la Culture à Grenoble, elle administre L’Ensemble Intercontemporain Pierre Boulez puis assure avec Patrice Chéreau la codirection du Théâtre des Amandiers de Nanterre. Elle a assuré à plusieurs reprises des fonctions ministérielles sous la présidence de François Mitterrand puis au sein du gouvernement de Lionel Jospin.
En quoi précisément pensez-vous que la réforme est dangereuse ?
La première clé de l’indépendance des médias est l’existence d’un financement pérenne et à la hauteur de leur mission. Sur ce plan, la réforme annoncée compromet gravement l’équilibre de France Télévisions, alors même qu’elle renforce le financement des chaînes privées. La seconde clé de l’indépendance, ce sont les règles de désignation des responsables. Sur ce plan aussi la réforme porte gravement atteinte à l’indépendance des chaînes publiques de radio et de télévision en remettant de fait, quels que soient les faux nez, dans les mains du Président de la République, le choix et la nomination de leurs responsables. La troisième clé de l’indépendance et du pluralisme, ce sont les règles limitant la concentration dans les mains de quelques grands groupes privées notamment ceux qui dépendent des commandes publiques de l’Etat. Sur ces trois plans, la réforme annoncée est dangereuse.
Dans quel cadre avez-vous décidé d’agir et avec qui ?
C’est l’action concertée des professionnels et des parlementaires qui doit peser sur le gouvernement pour réorienter la réforme (NDLR : les cosignataires engagés dans cette action sont Noël Mamère, Cédric Klapisch, Aurélie Filippetti, Fabrice Génestal, Malik Chibane, Bénédicte Lesage, Emmanuel Priou, Michel David, Marie Masmonteil, Arnaud Hamelin, Denis Rouger, Corinne Rufet, Michel Françaix, Serge Lagauche).
Que proposent concrètement les signataires de cette lettre ouverte pour que se maintiennent l’indépendance et le pluralisme des media ?
Il faut agir sur les trois plans à la fois : renforcement du financement autonome des médias, maintien de règles anti-concentration rigoureuses, et nomination par un organisme indépendant, tel le CSA dont la composition devrait être revu dans le sens d’un pluralisme effectif.