Interview de Edwy Plenel, Président et Directeur de la pubication Mediapart
Vous soulignez dans la présentation de Mediapart qu’il s’agit d’un « journal d’information numérique, indépendant et participatif ». Vous avez baptisé votre projet « Le prix de la liberté ». L’indépendance est manifestement pour vous un pré-requis indispensable à l’exercice du métier de journaliste.
Il n’y a pas de journalisme authentique sans indépendance. Indépendance à l’égard des pouvoirs, politiques, économiques et idéologiques. Etre journaliste, c’est être au service des citoyens. C’est s’engager à les informer honnêtement, scrupuleusement, contradictoirement, mais dans l’absolu respect de la vérité factuelle. Toute dépendance contredit cette ambition. La bataille de Mediapart, c’est de convaincre nos concitoyens que la liberté a un prix : celui de l’abonnement. La gratuité de l’information est un leurre qui prépare son uniformisation.
Mediapart propose également un modèle volontiers participatif. La « presse citoyenne » a le vent en poupe… Effet de mode ou pratique d’avenir ?
Journal totalement indépendant, Mediapart renouvelle en profondeur la relation d’un journal et de ses lecteurs. Il y a une crise de confiance des citoyens envers un journalisme installé, conformiste, suiviste et lointain. Nous n’avons pas le monopole de l’expertise, du commentaire, de l’analyse, de l’opinion et du point de vue – c’est une liberté d’expression qui appartient à tous. En revanche, nous avons un métier, avec ses compétences et ses urgences : enquêter librement, chercher l’information inédite, échapper à la communication trompeuse, aller sur le terrain. Mediapart associe ces deux dimensions : un journal numérique totalement inédit et un club ouvert à tous ses lecteurs, avec ses blogs individuels et ses éditions participatives.
Qu’est-il ressorti de la conférence qui s’est tenue en mars dernier – dont vous étiez partenaire – qui avait pour thème « L’indépendance de la presse : un enjeu démocratique » ?
C’était, à Lyon, l’un des nombreux débats auxquels nous avons participé pour présenter Mediapart. J’en ai surtout retenu la distinction par le philosophe Bernard Stiegler entre « presse » et « médias », indépendamment du support technique. La presse numérique que nous défendons à Mediapart s’oppose aux logiques de flux, d’instantanéité et d’audience, en promouvant les valeurs de hiérarchie, de rigueur et de profondeur d’une information de qualité.